article publié dans Le moniteur N° 5088 du 01/06/2001 -

rubrique Les hommes.page 10

« Construire pour ses enfants »

Jean-Marie Duthilleul, directeur de l'aménagement à la SNCF, président d'AREP

Comme la plupart des garçons, Jean-Marie Duthilleul a joué enfant aux trains électriques. S'il a été engagé comme architecte par la SNCF en 1986, c'est comme ingénieur des ponts qu'il a commencé ses chantiers : en 1977, il s'est trouvé chargé au ministère de l'Equipement du développement des villes nouvelles, à une époque de « profonde réflexion sur la ville moderne »

Toute gare est à ses yeux « un sujet d'aménagement du territoire, un morceau de ville qu'il convient de repenser ». Montparnasse, Lille, Roissy et Eole hier, Valence, Avignon et Aix-en-Provence aujourd'hui, Pékin demain... Jean-Marie Duthilleul privilégie partout espaces et volumes, traite les ambiances avec soin, « afin que les gens s'y sentent bien ».

Ce fils d'architecte, qui a « appris le métier » dans l'agence de son père, a préféré étudier la philosophie et préparer le concours d'entrée de l'Ecole polytechnique que de s'inscrire aux Beaux-Arts. L'enseignement qui y était dispensé juste après 1968 lui paraissait « bien peu enrichissant ». Il attendra 1975 pour le suivre.

Intérêt de ce double cursus ? « Ingénieur, je me suis familiarisé avec la matière, je sais comment le bois, le métal, le béton réagissent. Etudiant en archi, j'ai appris à concevoir le projet, à exprimer ce qui sera avant que cela ne soit. » Architecte et ingénieur, il estime qu'il « faudrait enseigner aux architectes un peu plus de rigueur, et aux ingénieurs davantage de poésie... La poésie n'est jamais que l'expression de la vérité »!

Si ses études scientifiques lui ont « appris à douter », l'homme juge que « le remède au doute c'est l'écoute. Notre liberté consiste à inventer des choses qui dépassent les contradictions sur lesquelles on bute ».

Passablement occupé entre ses projets français et étrangers - la nouvelle gare qu'il construit à Pékin lui apporte une consécration internationale -, ce quadragénaire s'efforce néanmoins de jouer pleinement son rôle de conseiller municipal : il est deuxième adjoint aux finances d'une petite commune de la Sarthe. Avec son épouse, rencontrée à Polytechnique - major de sa promotion, Anne Chopinet a fait une entrée remarquée à l'X, en 1972, année où les femmes furent admises -, il attache beaucoup d'importance à la vie familiale. Le couple juge fondamental d'être à l'écoute de leurs cinq enfants, âgés de 10 à 20 ans. « La télévision est absente de la maison. Nous sommes très attentifs à ce qu'ils sont, à ce qu'ils croient. Ils nous font part de leurs rêves. Quand je bâtis un projet, c'est à un horizon de dix ou vingt ans. Ce sont eux qui pratiqueront ces futurs lieux... »

© Carine Lenfant

CV

1977-82 : secrétariat général des villes nouvelles.

1982-83 : mission Exposition universelle.

1983-85 : mission Grands Projets de l'Etat à Paris

1986 : architecte en chef, puis directeur de l'aménagement de la SNCF.

1997 : création d'AREP (Aménagement, recherche, pôles d'échange), bureau d'études pluridisciplinaire spécialisé dans la conception et la réalisation des espaces du transport.

lire articles ?